Diodore de Sicile

Définition

Donald L. Wasson
de , traduit par Babeth Étiève-Cartwright
publié le 14 décembre 2020
Disponible dans ces autres langues: anglais, espagnol
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Diodorus Siculus (by Unknown Artist, Public Domain)
Diodore de Sicile
Unknown Artist (Public Domain)

Diodore de Sicile (actif au 1er siècle avant notre ère) était un historien grec, connu pour son histoire universelle Bibliotheca historica. À l'origine, il s'agissait d'une œuvre monumentale en 40 volumes, couvrant l'histoire de la région méditerranéenne depuis les temps mythiques jusqu'à sa propre vie, vers 60/59 avant notre ère. Aujourd'hui, 15 livres survivent dans leur intégralité et d'autres en fragments. Il fut accusé d'être un simple compilateur de sources antérieures, cependant, les écrits de Diodore ont également préservé des œuvres qui auraient pu être perdues sans lui, et de nos jours, la Bibliotheca est reconnue pour son unité de thèmes.

Jeunesse

On sait peu de choses sur son enfance - même ses dates de naissance et de décès sont spéculatives. On sait qu'il était originaire d'Agyrion (Agira moderne), en Sicile, et qu'il vécut à l'époque de Jules César (100-44 avant J.-C.) et d'Octave, le futur Auguste (63 av. J.-C. - 14 de notre ère). De nombreux historiens pensent qu'il mourut à l'époque du second triumvirat, composé d'Octave, de Lépide et de Marc-Antoine, vers 36 avant Jésus-Christ. Si l'on en croit une inscription sur une tombe à Agyrion (que l'on croit être la sienne), il était Diodore fils d'Apollonius. Bien que sa ville natale ait été considérée comme pauvre par l'orateur et homme d'État romain Marcus Tullius Cicero (alias Cicéron 106-43 av. J.-C.), d'autres suggèrent qu'il aurait pu être riche car il ne fait aucune référence dans ses écrits à une fonction publique, ce qui lui permit de passer près de 30 ans à écrire, voyager et faire des recherches.

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Bibliotheca Historica

L'histoire de Diodore de Sicile est considérée par les historiens modernes comme l'histoire de l'Antiquité la mieux conservée par un historien grec.

Son seul ouvrage connu, les 40 livres de la Bibliotheca Historica ou Bibliothèque historique, couvrait l'histoire de toute la région méditerranéenne depuis les temps mythiques jusqu'aux environs de 60/59 avant notre ère. Malheureusement, seuls 15 (livres 1-5 et 11-20) des 40 livres originaux ont survécu ; les autres sont des fragments. Outre ses propres recherches à travers ses voyages, il utilisa des histoires antérieures. Il vécut également à Rome pendant plusieurs années et là, eut accès à d'excellentes sources. Bien qu'il ait été accusé à tort par certains des premiers historiens de n'être qu'un compilateur, son histoire est considérée par les historiens modernes comme l'histoire de l'Antiquité la mieux conservée par un historien grec. On pense qu'il commença à écrire au début des années 50 avant J.-C. et commença à publier dans les années 40 avant J.-C., précédant ainsi l'historien romain Titus-Livius, plus connu sous le nom de Tite-Live (c. 64 av. J.-C. - c. 12 de notre ère).

Ayant initialement eu l'intention de prolonger son histoire jusqu'en 40 avant J.-C., il s'arrêta deux décennies plus tôt, réalisant que l'histoire contemporaine dans une période aussi turbulente était difficile et peut-être même hasardeuse. À la fin de son histoire, il fait référence à l'ascension de Jules César et à son triomphe dans la guerre des Gaules, notamment l'invasion de la Grande-Bretagne et le pontage du Rhin. De plus, ayant assisté à l'effondrement du Premier Triumvirat de César, Pompée et Crassus, Diodore réalisa probablement qu'il s'agissait d'une période politiquement dangereuse pour l'écriture et choisit de s'en arrêter là. Bien qu'il ait pu ou non connaître personnellement des autorités publiques, on pense qu'il était un admirateur de César.

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Diodorus Siculus' Bibliotheca Historica
Bibliotheca historica de Diodore de Sicile
The Wolf Law Library (CC BY-NC-ND)

Dans l'introduction de son histoire, il fournit au lecteur un aperçu de son travail. Il est intéressant de noter son utilisation de "nous" dans le paragraphe :

Puisque notre ouvrage est achevé et que les livres qui le composent sont encore inédits, je veux d'abord dire un mot sur le plan général que j'ai suivi. Les six premiers livres renferment les événements et les récits fabuleux antérieurs à la guerre de Troie, et, de ces six, les trois premiers comprennent les antiquités. des Barbares, et les trois autres, celles des Grecs. Dans les onze livres suivants, nous donnons l'histoire universelle depuis la guerre de Troie jusqu'à la mort d'Alexandre. (Trad. Ferd. Hoefer)

Contenu

Bien qu'il ait prétendu couvrir toute l'histoire, il concentra ses premiers volumes sur la Grèce et sa région natale, la Sicile, jusqu'à ce que ses sources sur Rome s'améliorent. À partir du début de la première guerre punique (264-241 av. J.-C.) avec Carthage, il accorda une plus grande attention à la ville et à la République romaine. Son travail sur sa patrie fut reconnu comme une source essentielle pour la Sicile classique, en particulier sa couverture de la rébellion des esclaves siciliens au IIe siècle av. J.-C.. Il affirme avoir beaucoup voyagé et visita l'Égypte entre 60 et 57 av. J.-C. ; cependant, ses détracteurs mettent en doute ses affirmations concernant d'autres régions et affirment qu'il ne semble pas connaître des villes grecques et asiatiques telles qu'Athènes, Milet, Éphèse et Antioche.

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Bien qu'il soit fier de sa propre entreprise, il est évident qu'il appréciait vraiment les historiens qui l'avaient précédé.

Comme il le mentionne dans les grandes lignes de son premier livre, les livres 1 à 6 couvrent l'histoire mythique des peuples non-helléniques et helléniques, la géographie et l'ethnographie de la région qui se termine par la chute de Troie. Les livres 7 à 17 comprennent l'histoire grecque depuis la guerre de Troie jusqu'à la mort d'Alexandre le Grand en 323 av. J.-C., en passant par Philippe II de Macédoine, tandis que les livres 18 à 40 se poursuivent jusqu'à la guerre des Gaules de César. Les livres 11 à 20 qui subsistent couvrent les années 480 à 302 avant notre ère. Certains historiens suggèrent qu'il aurait envisagé d'écrire deux livres supplémentaires couvrant l'histoire jusqu'en 46/45 avant J.-C., mais il s'agit là d'une pure conjecture.

S'il était fier de sa propre entreprise, il est évident qu'il appréciait vraiment les historiens qui l'avaient précédé. Dans l'introduction du premier livre, il remercia les historiens qui lui avaient ouvert la voie :

Tous les hommes doivent de la reconnaissance à ceux qui approfondissent l'histoire universelle et s'efforcent de contribuer, par leurs travaux, au bien général de la société. Livrés à un enseignement utile, ils procurent au lecteur la plus belle expérience des choses humaines, sans lui en faire payer l'apprentissage. L'expérience qu'on acquiert soi-même ne peut être le fruit que de grands labeurs et de beaucoup de souffrances. (5)

Sans jamais contester qu'il avait utilisé le matériel d'historiens antérieurs, il se servit des travaux d'Hécatée de Milet (c. 550 - c. 476 avant J.-C.) pour des informations sur l'Égypte, de l'historien grec Timée (c. 350 - c. 260 avant J.-C.) pour des informations sur la Sicile et les Olympiades, et de l'historien et diplomate grec Mégasthène (350-290 av. J.-C.) pour des récits de première main sur l'Inde. Outre ceux mentionnés ci-dessus, il fut influencé par l'historien grec et auteur des Histoires Polybe (c. 208-125 av. J.-C.), qui écrivit sur la République romaine, l'homme d'État Hiéronymos de Cardia, contemporain d'Alexandre, qui écrivit sur les guerres des Diadoques, l'historien Éphore de Cumes (c. 405 - c. 330 av. J.-C.), dont les 30 livres d'histoire sont perdus, et le philosophe, historien et astronome stoïcien Posidonios (c. 135-51 av. J.-C.). Heureusement, grâce à son histoire, les écrits de ces historiens et d'autres n'ont pas été perdus.

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Bien que certains lui reprochent d'être un simple compilateur, il n'était pas toujours d'accord avec les interprétations des historiens qui l'avaient précédé, même les pères de l'histoire Hérodote (484 - 425/413 av. J.-C.) et Thucydide (460/455 - 399/398 av. J.-C.). Paul Cartledge, dans son livre Thebes, parle de la divergence de Diodore par rapport à un épisode historique écrit par le célèbre historien grec Xénophon (c. 430 - c. 354). Xénophon était anti-Thèbes et pro-Sparte et omit plus d'une fois de reconnaître une victoire thébaine sur Sparte. L'un de ces incidents est une victoire thébaine lors de la bataille de Leuctres en Béotie en 371 avant notre ère. Bien que Diodore ait reconnu l'erreur de Xénophon, qu'il ait "rendu pleinement justice par voie de compensation" à l'omission et qu'il ait corrigé l'erreur, Cartledge affirme cependant que le passage de l'historien est "sélectif, inexact et ennuyeux." (11)

Diodore choisit sagement de terminer son histoire avant l'avènement de César et d'Auguste. C'était une époque agitée pour Diodore car il était probablement à Rome au moment de l'assassinat de César en 44 av. J.-C. et de la vengeance d'Octave (Auguste) contre les assassins. S'étant installé à Rome vers 56 av. J.-C., il connut une Rome en pleine transition. Rome était en train de conquérir la Méditerranée, et des gens comme Cicéron écrivaient des articles défavorables à son sujet. Malheureusement pour Cicéron, ses critiques virulentes entraînèrent sa mort. Et, tout comme Cicéron, Diodore n'aimait pas ce qu'il voyait. Ses écrits révèlent son dégoût pour Rome et ce qu'elle était en train de devenir : un conquérant sans pitié. Il voyait la cruauté dans le traitement des pauvres et des esclaves et l'impiété de Rome et de son peuple.

Bibliotheca Historica
Bibliotheca historica
University of Glasgow Library (CC BY-NC-SA)

Dans son livre The Rise of Rome, l'historien Anthony Everitt cite Diodore à propos du sort des esclaves travaillant dans les mines, où beaucoup préféraient la mort à la simple survie : "Jour et nuit, ils usent leurs corps à creuser sous terre, mourant en grand nombre à cause des terribles conditions qu'ils doivent endurer" (Everitt 330). Et, citant Diodore, Everitt écrit que les Romains traitaient ceux qu'ils conquéraient comme "des bienfaiteurs et des amis... mais une fois qu'ils eurent contrôlé la quasi-totalité du monde habité, ils confirmèrent leur pouvoir par le terrorisme et par la destruction des villes les plus illustres" (345). Everitt oppose cette nouvelle Rome à celle d'une époque révolue en affirmant que cette nouvelle brutalité des Romains s'accompagnait de corruption dans la vie publique.

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Diodore critiqua également le traitement des pauvres de la ville qui avaient été chassés de leurs terres et s'étaient réfugiés dans la ville à la recherche de travail. Selon l'ouvrage de l'historien Mike Duncan, The Storm before the Storm, quelques-uns s' enrichirent tandis que les pauvres s'affaiblirent en raison du "poids oppressant de la pauvreté, des impôts et du service militaire" (20). Faisant référence au travail dans les mines, il ajoute que "le travail était fatal, mais les profits astronomiques" (51). Cette évolution de Rome influença peut-être la décision de Diodore de terminer son histoire au moment où il le fit.

Héritage

Bien qu'ils reconnaissent à Diodore le mérite d'avoir écrit dans un style clair et sans affectation, certains historiens, révisant l'histoire de Diodore, l'ont souvent critiqué, citant son manque d'expérience militaire et politique. Cela puT affecter son jugement et contribuer à une faible fiabilité historique. Les historiens plus modernes le voient différemment, et s'ils comprennent et reconnaissent qu'il reste quelques erreurs et distorsions, Diodore a été félicité, et non critiqué, pour son unité de thèmes et sa créativité. Cependant, qu'on le félicite ou qu'on le critique, son histoire doit être appréciée, ne serait-ce que pour son utilisation d'histoires antérieures qui auraient pu être perdues et oubliées depuis longtemps.

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Traducteur

Babeth Étiève-Cartwright
Babeth s'est consacrée à la traduction après avoir enseigné l'anglais au British Council de Milan. Elle parle couramment le français, l'anglais et l'italien et a 25 ans d'expérience dans le domaine de l'éducation. Elle aime voyager et découvrir l'histoire et le patrimoine d'autres cultures.

Auteur

Donald L. Wasson
Donald a enseigné l’histoire antique et médiévale ainsi que l’histoire des États-Unis à Lincoln College (Illinois). Éternel étudiant d’histoire depuis qu’il a découvert Alexandre le Grand, il met toute son énergie à transmettre son savoir à ses étudiants.

Citer cette ressource

Style APA

Wasson, D. L. (2020, décembre 14). Diodore de Sicile [Diodorus Siculus]. (B. Étiève-Cartwright, Traducteur). World History Encyclopedia. Extrait de https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-10169/diodore-de-sicile/

Style Chicago

Wasson, Donald L.. "Diodore de Sicile." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. modifié le décembre 14, 2020. https://www.worldhistory.org/trans/fr/1-10169/diodore-de-sicile/.

Style MLA

Wasson, Donald L.. "Diodore de Sicile." Traduit par Babeth Étiève-Cartwright. World History Encyclopedia. World History Encyclopedia, 14 déc. 2020. Web. 08 oct. 2024.

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